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LP FONTANA sorti en avril 1973
Réf. : 6325 304
Album précédent : A l'Olympia (1972)
Chemins de Terre fait partie de cette poignée d’album qui devraient être en tête du classement de « Mes disques à moi » tant je l’ai écouté au moment de sa sortie. J’étais fan exclusif d’Alan Stivell et après l’Olympia, cet album studio ne pouvait qu’étancher avec bonheur ma passion.
Aujourd’hui, cet album n’a pas pris une ride et reste pour moi un modèle de perfection. Entre chansons douces ou plaintives, danses bretonnes ou rock, mélangeant instruments traditionnels et électriques grâce à de subtils arrangements, tout n’est que réussite. Stivell est accompagné de musiciens exceptionnels, en particulier Gabriel Yacoub (pour la dernière fois) et Dan Ar Bras. L’influence de ces deux musiciens est très nette. René Werneer mérite également d'être cité, tant son violon imprègne le disque.
Crédits :
Alan Stivell : Chant, harpe celtique, cornemuse écossaise, flûte irlandaise, Mellotron, timbales, harmonium.
Gabriel Yacoub : Guitare acoustique, banjo, dulcimer, psalterion, chant
René Werneer : Fiddle, chant.
Pascal Stive : Orgue, piano.
Jean-Luc Hallereau : Basse, chant.
Dan Ar Bras : Guitare acoustique, guitare électrique, chant
Michel Santangeli : batterie
Participations de Marie Yacoub (cuillers, chant), Elyane Werneer (chant), Mareille Werneer (chant), Michel Delaporte (tablas) Bagad Bleimor : cornemuses, bombardes, batterie écossaise.
Enregistré au château d’Hérouville
Ingénieur du son : Dominique Blanc Francard
Une production Fontana réalisée par Franck Giboni.
Wikipédia propose une analyse musicale fort riche et complète avec laquelle je suis assez en phase.
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Jacques VASSAL dans « La Nouvelle Chanson Bretonne », consacre un paragraphe sur « Chemins de Terre » que je reproduis ci-dessous :
CHEMINS DE TERRE…
Tel est le titre du quatrième album de Stivell, sorti en avril 1973 après une longue attente. Attente due à une préparation particulièrement soignée et patiente à tous les stades, depuis la première prise en studio jusqu’aux notes de la pochette, en passant par les mixages de bandes. A un moment crucial de son évolution, Alan semble montrer, à la fois plus d’ambition (il a déjà fait ses preuves) et d’humilité (il sait qu’il lui reste beaucoup de « chemins » à parcourir). C’est ainsi qu’il note :
« Naissance d’une musique européenne, équivalente à la rock-music américaine, une musique vraiment populaire, ne cherchant pas la facilité, croyant à la dignité des hommes. Ensuite, faire le monde nouveau, chanter la Bretagne embryonnaire des travailleurs et des coopératives, des villes sous-marines, des cités de verre, et de granit, d’acier, de marées, de pain.
« Reprendre les chemins de terre avant de s’embarquer pour les îles. »
L’album est certainement le meilleur recueil de « progressive folk » jamais produit en France, si ce n’est le tout premier. Il est d’un niveau comparable à celui des meilleurs groupes anglais du genre, tels Fairport Convention ou Steeleye Span. Cela est dû en grande partie à un remarquable effort de cohésion des musiciens du groupe, qui ont aidé Alan à créer les arrangements des morceaux avant de les traduire en musique.
Des onze morceaux du disque, dix sont des traditionnels des pays celtiques, arrangés par le groupe. Un seul est une composition originale d’Alan. La caractéristique la plus évidente dès l’introduction de « Susy MacGuire » par le dulcimer de Gabriel Yacoub, c’est la clarté, la limpidité du son. D’un bout à l’autre, elle ne se démentira pas une fois et c’st un premier agrément. « Ian Morrison Réel » sur un air écossais, est devenu un véritable rock où Dan Ar Bras (guitare électrique) et Michel Santageli (batterie) poursuivent un dialogue fou avec la bombarde d’Alan. La même formule sera reprise sur la face 2 dans l’ « An Dro Nevez », augmentée d’une partie de fiddle (René Werneer) et de dulcimer. Mais elle culmine dans « Brezhoneg Raok » avec en plus le piano de Pascal Stive et à la fin de folles distorsions, hendrixiennes, de la guitare de Dan. Exagérations ? Tant pis ! il faut exagérer ! Ou mourir raisonnable. Le texte de « Brezhoneg Raok » est un vibrant plaidoyer pour la langue bretonne, apte à réconcilier Alan avec ses compatriotes.
Le reste du disque st plus proche du style traditionnel et devrait donc rassurer quand même les « puristes » (mais sans le faire exprès) : Alan y célèbre de nouveau l’Irlande (« she moved through the fair ») et le Pays de Galles avec ce « Can y Melinydd » (chanson du meunier à la merveilleuse partie de banjo et de violon), dont l’air est cousin de l’américain « Little Sadie ». L’Ecosse de nouveau, avec la berceuse « Oidhche Mhaith » qui annonce dans un rêve amour, santé et paix.
Et la Bretagne ? Alan lui consacre tout la face 2 puisque, en dehors de l’ « An Dro Nevez » et de « Brezhoneg Raok », nous y retrouvons « Maro Ma Mestrez » (la mort de ma bien-aimée) chanté a cappella avec une maîtrise étonnante. « An Hani A Garan » (une grande chanson amoureuse du Vannetais), « Metig » (danse fisel des montagnes) et « Kimiad » (le départ du conscrit). Les sonneurs du Bagard Bleimor concluent en beauté ce disque plus breton et pourtant plus universel que jamais.
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Pour finir, une anecdote de Dominique BLANC-FRANCARD tirée de son ouvrage « It’s a teenager dream ».
Un soir, après un copieux dîner comme savait si bien les faire le cuisinier du Château, nous nous retrouvions dans le studio pour enregistrer une pièce de harpe celtique assez difficile qu’Alan devait jouer. Il avait pas mal bu, beaucoup même. Il s’installa derrière son instrument. Je lançai le magnéto en record, et la prise dura à peu près cinq minutes. C’était très beau. Nous lui avons dit de venir écouter et il arriva un peu titubant dans la cabine. Je renvoyai alors la bande en lecture, il était assis à côté de moi derrière la console. J’ai cru qu’il s’était endormi car il ne manifestait aucun signe d’activité extérieure. Quand le morceau fut fini et que j’eus appuyé sur Stop, il se réveilla soudain et lança d’une voix haute : « Oh ! Comme c’était beau ! J’espère que vous l’avez enregistré ! ».